Je sais, cela fait des semaines que je vous parle de gestion et de réduction des conflits et tout d’un coup, sans crier gare, je décide de vous parler des bienfaits des désaccords … Mais vous allez voir que ce n’est pas si antagoniste que cela en a l’air.
Dans une précédente publication je vous parlait des étapes d’évolution que connait un conflit avant de finir en confrontation armée, et je faisais la différence entre le désaccord et le conflit.
Le conflit, c’est ce que l’on souhaite apprendre à gérer, pourquoi ? Car que ce soit pour nous ou pour les autres cela correspond à un moment où nous vivons des émotions intenses et dégradées, où notre cortex préfrontal (le siège de la réflexion et de raisonnement) est totalement inactif : nous perdons toute valeur ajoutée dans nos échanges car ils ne sont orientés que pour nous défendre ou nous donner une sensation de sécurité, souvent en écrasant l’autre.
Le désaccord est l’étape qui précède le conflit. Le désaccord, c’est ce que l’on souhaite voir et rencontrer au quotidien car il éclaire les situations que nous pouvons vivre d’une façon qui ne nous est pas familière et nous permet d’adopter de nouvelles perspectives. Le désaccord est l’opposition, la friction intellectuelle ou émotionnelle qui peut être porteuse de valeur ajoutée.
Naturellement, nous allons nous entourer de gens qui nous ressemblent, cela est rassurant car on se sent appartenir (rappelez vous, le besoin d’appartenance est un besoin fondamental) et on se sent également être normal et non pas marginal (l’exclusion quant à elle active une sensation de danger). Mais le fait de ne s’entourer de personnes qui vous ressemblent ou qui sont d’accord avec vous (parce que c’est également psychologiquement agréable d’entendre des gens qui vont dans votre sens) limite énormément votre champ des possibles.
Dans son excellent livre Rebel Talent, Francesca Gino partage l’exemple d’entreprises ou institutions qui intègrent dans leur fonctionnement la mise en place systématique de l’expression du désaccord, voyant dans l’unanimité un danger dans la prise de décision. Je vous partage ici trois exemples que j’ai trouvés extrêmement intéressants :
Le premier exemple concerne l’entreprise Ariel Investment, société de gestion d’actifs aux Etats-Unis. Depuis la crise financière de 2008-2009 la société a mis systématiquement en place le fonctionnement suivant dans les réunions qui précèdent les prises de décision importantes : un employé doit jouer l’avocat du diable, émettre des objections, des freins, montrer explicitement et de façon constructive son désaccord.
Le deuxième exemple qu’elle cite, c’est la façon dont le Président J. F. Kennedy a géré la crise des Missiles à Cuba. Après l’échec du débarquement de la Baie de cochons, le Président Kennedy a décidé de revoir le mécanisme de prise de décision au sein de son cabinet. Un des éléments qu’il a mis en place, parmi tant d’autres, était de créer des équipes de travail en petits groupes pour que les collaborateurs puissent plus facilement faire part de leur désaccord en son absence. L’objectif était d’éviter à tout prix “la pensée de groupe” qui mène au consensus mais pas à la décision la plus optimale.
Enfin le dernier exemple que j’ai choisi de vous partager, c’est la phrase de Alfred Sloan (Président de General Motors de 1937 à 1956) qui lors des réunions où des décisions importantes devaient être prises disait “Je vous que nous sommes ici tous parfaitement d’accord sur la décision à prendre … Je vous propose donc que nous décalions la réunion pour nous donner le temps de réfléchir à d’éventuels désaccords et peut-être mieux comprendre les enjeux de cette décision”.
Etre capable d’intégrer le désaccord dans sa prise de décision est ce qui permet d’avoir une réelle diversité dans la vision, la prise de décision et la projection. Néanmoins, cela requiert deux éléments indispensables : être capable d’accepter la remise en cause de sa perception d’une situation mais également de savoir faire part de son désaccord de façon constructive.
Enfin, une organisation qui permet à ses employés de faire part explicitement de leur désaccord augmente leur niveau d’engagement. Les employés sont entendus et ne voient pas leur frustration augmenter lorsqu’ils sont en désaccord face à des décisions qui ne leur conviennent pas.
Take away
La frontière entre le désaccord et le conflit, ce sont les émotions dégradées.
Le désaccord est contre intuitivement source de richesse car il fait grandir grâce à la diversité des points de vue.
Accepter le désaccord demande au préalable de savoir remettre en cause sa propre perception du monde
En attendant la prochaine publication, si vous souhaitez tout savoir sur comment obtenir votre rupture conventionnelle, c’est par ici
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